L'industrie mondiale du transport aérien continue de faire face à une chute importante du trafic et de la demande lorsque l'épidémie de COVID-19 a entraîné des restrictions de voyage imposées dans de nombreux pays du monde, dont le Canada et les États-Unis. Le service de passagers d'Air Canada a été réduit de 90 % dans la foulée de ces répercussions sans précédent. En revanche, Air Canada Cargo a connu une augmentation notable de la demande de fret pour de l'équipement de protection individuelle (EPI), notamment des masques et d'autres fournitures à l'intention des répondants médicaux de première ligne.
Qu'il s'agisse d'un musicien qui veut acheminer son instrument pour son prochain concert ou du gouvernement du Canada qui collabore avec un transitaire à l'importation d'abeilles [lien vers l'article], il est encore possible d'expédier du fret par l'entremise d'Air Canada Cargo. La division commercialise l'espace excédentaire des soutes des avions de passagers à quiconque doit transporter par voie aérienne des envois urgents. Les perturbations que la COVID-19 a causées dans le secteur du transport aérien ont amené Air Canada a accroître ses activités de fret afin de soutenir la chaîne d'approvisionnement canadienne et internationale. La Société a reconfiguré trois appareils 777-300ER de Boeing, le plus gros de ses avions, en retirant 422 sièges et en installant des dispositifs pour arrimage des cargaisons de marchandises dans la cabine passagers.
En cinq jours, la Société a doublé la capacité d'emport de fret de ces appareils. Air Canada et Air Canada Cargo ont ensuite pris des mesures pour amener au Canada des fournitures médicales et autres articles essentiels.
Le 18 avril, Kelly Shaw, commandante de bord d'un 777 de Boeing d'Air Canada, a piloté un vol historique, l'AC2284, le premier vol tout-cargo – AC2284 – exploité par la Société depuis 30 ans avec le premier appareil transformé.
« C'était vraiment spécial de ne pas avoir de personnel de cabine ni de clients à bord. L'appareil transportait une trentaine de tonnes de marchandises, dont 15 (14 000 kg) sur le pont supérieur, a déclaré la commandante Shaw. Le premier officier André Fast et moi avons traversé toute la cabine pour procéder aux vérifications avant vol. »
Pour le transport des passagers ou du fret, il est crucial de tenir compte de la masse et du centrage dans la planification des vols, car cela a une incidence sur l'itinéraire, la consommation de carburant, et la vitesse au décollage et à l'atterrissage. Des équipes spécialisées dans de nombreux secteurs techniques aident les pilotes pour chaque vol, dont les vols tout-cargo, en faisant des calculs à l'aide de logiciels complexes qui tiennent compte de variables indépendantes comme les conditions météorologiques, la vitesse du vent et le poids des marchandises.
Des breffages téléphoniques quotidiens et des réunions sur plusieurs fuseaux horaires ont été organisés pour gérer les opérations spécialisées intervenant dans le transport de fret de l'Asie au Canada. Tokyo Narita a servi de point central pour les missions de fret en Asie, car l'aéroport répondait à deux facteurs d'exploitation essentiels : il s'agit d'une plaque tournante efficace pour assurer des navettes aériennes à destination et au départ de Shanghai, où nous disposions de créneaux horaires très limités pour récupérer les marchandises, et d'une destination de repos en escale pour les équipages.
Les équipes de techniciens d'entretien d'aéronefs sont essentielles pour ces nouvelles missions assurées au moyen de 777 de Boeing convertis. Ces techniciens, qui ont reçu une formation spécialisée comme convoyeurs, s'assurent que le fret est chargé et arrimé en toute sécurité et selon des plans sur mesure. Les cargaisons transportées sur le pont supérieur doivent être placées dans 36 positions ayant chacune ses propres limites de poids, forme et hauteur, conformément aux exigences de masse et centrage de la cabine.
« Le plan du vol historique du 18 avril consistait à effectuer le trajet d'environ quatre heures entre Tokyo et Shanghai, où nous disposions d'un petit créneau pour récupérer le fret, puis de retourner à Tokyo pour un changement d'équipage avant de mettre le cap sur le Canada, a expliqué la commandante Shaw. Nous étions accompagnés de Chris et Francesc, les convoyeurs du premier vol tout-cargo. »
Techniciens d'entretien d'aéronefs à Toronto ayant chacun plus de 20 ans d'expérience et qualifiés pour différents types d'avions, Francesc Sagues-Muizelaar et Christopher Ernest se sont portés volontaires pour recevoir une formation de convoyeurs au début d'avril 2020.
« Je ne m'ennuie jamais au travail, a affirmé Chris. Une journée typique, nous accueillons l'avion, faisons un débreffage par casque d'écoute avec les pilotes, et inspectons l'extérieur et l'extérieur de l'appareil. S'il y a le moindre problème, nous le réglons. Comme les pépins surgissent parfois inopinément, nous devons savoir quoi faire sur-le-champ. »
Forts de leurs compétences comme techniciens d'entretien d'aéronefs et de leurs connaissances techniques, Francesc et Chris sont devenus des experts dans le chargement sécuritaire des vols tout-cargo en l'espace de seulement deux semaines.
« Jamais, dans mes rêves les plus fous, je n'aurais imaginé aller jusqu'en Chine, en pleine pandémie, pour aller chercher des fournitures médicales, a fait remarquer Francesc. Nous étions prêts et excités à l'idée d'accomplir la mission, et nous avions une assez bonne idée du déroulement de la journée. Mais nous avons vite réalisé que nos aptitudes à résoudre des problèmes seraient vite mises à profit. »
« Une fois rendus à la courroie de chargement, tout a bien commencé. L'un de nous surveillait les caisses et vérifiait les étiquettes pour connaître le poids et savoir s'il y avait des matières inflammables. L'autre indiquait où placer les caisses dans la zone. »
La première heure s'est bien passée, le chargement s'effectuant selon le plan parce que toutes les caisses avaient la même taille et le même poids. Les choses se sont toutefois compliquées lorsque des boîtes de différentes tailles et d'autres sans étiquette sont arrivées.
« Nous avons dû nous arrêter plusieurs fois pour nous assurer que les cargaisons embarquées ne nuiraient pas à la sécurité du vol, a poursuivi Francesc. Quand des caisses de taille différente ont commencé à arriver, nous avons compris que certaines ne pourraient pas être placées à l'endroit qui leur avait été désigné et nous avons dû les mettre ailleurs, ce qui nous a retardés. De plus, certaines caisses ne correspondaient pas à nos calculs et d'autres retards sont devenus inévitables. »
Comme nous avions très peu de temps à Shanghai pour récupérer les marchandises, il fallait agir vite.
Les minutes passaient, la limite réglementaire de journée de service des pilotes approchait et il devenait impérieux que tout le monde fasse de son mieux pour trouver les caisses manquantes et effectuer les calculs de centrage.
Équipés de combinaisons pour matières dangereuses, masques faciaux et gants, Chris et Francesc ont terminé de charger dans les zones désignées les caisses de masques, de gants et de blouses au moyen de transporteurs à rouleaux. Chaque zone a été marquée et étiquetée en fonction du poids maximal pour un repérage rapide. Une fois la zone remplie, elle a été vérifiée, recouverte de filets et arrimée au plancher.
L'équipage a finalement quitté Shanghai pour revenir à Tokyo Narita après être resté presque cinq heures au sol. Pendant le trajet de retour, les convoyeurs ont vérifié la charge toutes les 30 minutes pour repérer les boîtes qui se seraient déplacées et d'éventuels risques pour la sécurité.
De même que l'on procède à un changement de joueurs pendant un match important des séries éliminatoires, l'équipage a débarqué à Tokyo pour son repos en escale et un autre groupe de pilotes et de convoyeurs qui venait de terminer le sien a été déployé pour assurer le dernier segment de la mission, soit ramener l'appareil au Canada.
« Je suis honoré de faire partie de cette équipe et de contribuer à fournir de l'EPI au personnel médical, a déclaré Francesc. Quand la pandémie sera terminée, je me souviendrai de la façon dont Air Canada est venue à la rescousse et est devenue un leader dans cette lutte ».
La commandante Shaw a vécu une expérience semblable. « Beaucoup de gens agissent en coulisses pour apporter des fournitures en première ligne, et cela montre réellement ce que la Société peut accomplir. C'est en voyant l'inscription « masque facial » sur la caisse que j'ai réalisé tout ce qu'Air Canada fait pour les travailleurs de première ligne. »
À l'heure actuelle, Air Canada exploite chaque jour une moyenne de 20 vols tout-cargo internationaux qui apportent au Canada de l'EPI essentiel, en plus d'autres fournitures et marchandises nécessaires à l'économie canadienne et mondiale.
En outre, l'un des vols tout-cargo exploités par Air Canada a été le plus long vol direct de l'histoire de la Société. Le 787-9 de Boeing est parti de l'aéroport Toronto-Pearson et a fait un arrêt à Los Angeles, avant de se rendre à Sydney, en Australie. C'est au retour que le vol AC7214 du 26 avril a battu tous les records en effectuant sans escale le trajet entre l'Australie et Toronto.
Au retour, l'appareil a franchi près de 15 800 kilomètres (9 800 milles) en quelque 16,5 heures. La soute contenait plus de 17 800 kg de fournitures pharmaceutiques, de matériel électronique et de pièces de forage, ainsi que trois palettes de bœuf réfrigéré destiné à des supermarchés canadiens.
Jazz, le partenaire d'Air Canada Express a récemment converti des Dash 8-400 en avions tout-cargo pour acheminer des fournitures essentielles un peu partout au Canada.
Le fait de pouvoir transformer rapidement ses avions et d'avoir une expertise opérationnelle internationale permet à Air Canada d'être, en ces temps exceptionnels, un maillon fondamental dans la chaîne d'approvisionnement mondiale en aidant à acheminer des fournitures médicales essentielles et d'autres marchandises importantes à destination et au départ du Canada afin de soutenir l'économie planétaire.